Qu’est-ce-que la plainte mnésique ?

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La plainte mnésique est exprimée spontanément par la personne elle-même au cours d’une visite médicale ou par l’entourage.

Elle est l’expression d’une mauvaise perception par l’individu de ses capacités de mémorisation.

La plainte mnésique peut être également décelée au moyen de questionnaires qui permettent d’apprécier le fonctionnement actuel de la mémoire du sujet ou de la comparer à un fonctionnement antérieur (en général l’année précédente).

On distingue deux principaux types de questionnaires. Un premier type de questionnaire dans lequel il est demandé au sujet d’évaluer la fréquence avec laquelle il rencontre un certain nombre de difficultés de mémoire et un second type au cours duquel l’examinateur demande au sujet ce qu’il pense de sa mémoire.

La plainte mnésique est un trouble de mémoire ressenti par environ la moitié des personnes de plus de 55 ans. Elle est le plus souvent la cause d’un déficit d’attention qui diminue les capacités d’apprentissage (encodage) et de récupération de l’information. Cette perte d’attention a d’autant plus de répercussion dans la vie quotidienne que nous sommes souvent sollicités.

D’autres facteurs peuvent être à l’origine d’une plainte mnésique : des troubles de l’humeur et de l’anxiété, des soucis personnels, une mauvaise qualité du sommeil ou des médicaments qui diminuent la performance de la mémoire.

Certains médicaments diminuent la performance de la mémoire

Des chercheurs américains ont pointé du doigt certains médicaments qui provoquent une baisse de la fonction mnésique en bloquant les effets de l’acétylcholine, un neurotransmetteur impliqué dans la mémoire.

Ces médicaments dits anticholinergiques incluent :

  • les anti-histaminiques (ex. diphénydramine);
  • l’antidépresseur doxépine;
  • l’oxybutynine (Ditropan) qui traite l’incontinence urinaire;
  • certains médicaments pour aider à dormir (somnifères) et traiter des maladies chroniques telles que l’hypertension (antihypertenseurs, diurétiques).

Source: Shelly Gray et coll. Cumulative Use of Strong Anticholinergics and Incident Dementia. JAMA Internal Medicine, janvier 2015

Enfin, la plainte mnésique peut être l’expression d’une maladie neurodégénérative sous- jacente (ex. maladie d’Alzheimer).

Exemples de causes à l’origine d’une plainte mnésique

Causes Etapes de la mémoire perturbées
Dépression, états confusionnel, médicaments Apprentissage (encodage)
Lésions de l’hippocampe (ex. maladie d’Alzheimer) Stockage et consolidation
Dépression, démence fronto-temporale Restitution (récupération)

Dans tous les cas, un traitement et une prise en charge doivent être entrepris. Le médecin doit évaluer avec le patient et son entourage la nature de la plainte mnésique et son retentissement dans la vie quotidienne (ex. finances, activités domestiques, soin personnel, loisir).

Si le bilan neuropsychologique est normal, et qu’il n’existe aucun retentissement au quotidien, la mémoire est réévalué dans l’année qui suit. Le médecin peut proposer au sujet de participer à des ateliers mémoire.

Recommandations de la Haute Autorité de la Santé (France, 2011)

Suite à une première visite chez le médecin, si les tests révèlent des performances cognitives normales, qu’il n’existe pas de retentissement sur les activités de la vie quotidienne et qu’il n’existe pas de troubles de l’humeur ou du comportement, le médecin propose une deuxième évaluation de 6 à 12 mois plus tard.

Si cette première évaluation met en évidence une altération des performances, il est recommandé de demander un avis spécialisé auprès d’un spécialiste (neurologue, gériatre, psychiatre) ou d’un centre de consultation de la mémoire)

Pourquoi il est important de se pencher sur la plainte mnésique ?

Les personnes âgées qui ont l’impression de perdre la mémoire sont plus à risque de souffrir de troubles avérés, c’est-à-dire quantifiables à l’aide de tests neuropsychologiques.

Des chercheurs américains (Université du Kentucky) ont demandé à 531 septuagénaires sans trouble cognitif s’ils avaient noté un changement dans leur performance mnésique. Les participants ont ensuite été suivis, en moyenne, pendant dix ans.

Plus de la moitié (56%) ont signalé que leur mémoire se dégradait. Ce groupe était presque trois fois (2,8) plus susceptible de développer des problèmes de mémoire que celui composé de sujets ne s’étant plaints d’aucun trouble.

Environ un participant sur six a développé une démence pendant l’étude. Parmi eux, 80 % avaient préalablement rapporté des problèmes de mémoire. Les troubles de mémoire avérés ont été observés en moyenne neuf ans après les premières pertes de mémoire signalées par le patient.

L’auteur principal de l’étude (Dr Kryscio) estime que l’on peut retarder l’apparition de ces troubles. Il tient également à rassurer les personnes qui ont parfois des oublis.

Les données de la cohorte PAQUID (France) ont également montré que la plainte mnésique était prédictive d’un risque plus élevé de démence. Par exemple, ce risque est multiplié par 5 lorsque les individus de plaignent de troubles mnésiques et présentent des résultats médiocres aux tests.

Comment évaluer la plainte mnésique ?

Références

Amariglio RE et coll. Tracking early decline in cognitive function in older individuals at risk for Alzheimer disease dementia: the Alzheimer’s disease cooperative study cognitive function instrument. JAMA Neurol. 2015 72:446-54.

Comijs HC et coll. Memory complaints; the association with psycho-affective and health problems and the role of personality characteristics. A 6-year follow-up study. J Affect Disord. 2002 72(2):157-65.

Crook TH 3rd et coll. Assessment of memory complaint in age-associated memory impairment: the MAC-Q. Int Psychogeriatr. 1992 Fall;4(2):165-76.

Dartigues J. et coll., Epidémiologie des troubles de la mémoire Thérapie, 1997. 52: p. 503-6.

Jorm AF et coll. Memory complaints in a community sample aged 60-64 years: associations with cognitive functioning, psychiatric symptoms, medical conditions, APOE genotype,hippocampus and amygdala volumes, and white-matter hyperintensities. Psychol Med. 2004 34:1495-506.

Kryscio et coll. Self-reported memory complaints, Neurology. octobre 2014.