Trouble bipolaire

Actualités

Le trouble bipolaire, anciennement appelé dépression maniaque, est un problème de santé mentale qui provoque des sautes d’humeur extrêmes avec des hauts émotionnels (manie ou hypomanie) et des bas (dépression).

Le trouble bipolaire (autrefois connu sous le nom de maniaco-dépression) provoque de graves changements d’humeur, d’énergie, de pensée et de comportement. Plus qu’une simple bonne ou mauvaise humeur passagère, les cycles du trouble bipolaire durent des jours, des semaines ou des mois.

Les différentes types de trouble bipolaire

Les symptômes du trouble bipolaire diffèrent selon le type. Au sein de ces trois types, les personnes peuvent connaître une fréquence et une gravité différentes des épisodes maniaques et dépressifs.

1. Le trouble bipolaire de type I.  Il est caractérisé par des épisodes maniaques qui durent au moins 7 jours , ou moins mais avec des symptômes suffisamment graves qu’ils nécessitent que la personne soit hospitalisée. Les personnes peuvent également connaître des épisodes dépressifs qui durent généralement 2 semaines, bien que les personnes bipolaires I ne connaissent jamais d’épisode dépressif majeur.

2. Les trouble bipolaire de type II. Ils se caractérisent par des dépressions majeures récurrentes avec hypomanie et/ou tempérament cyclothymique (oscillations brutales parmi des manifestations subjectives et comportementales). Les épisodes hypomaniaques qui sont précédés ou suivis d’un épisode dépressif majeur.

3. Les trouble bipolaire de type III. Ils se caractérisent par des états dépressifs majeurs récurrents sans hypomanie.

Les troubles bipolaires chez les personnes âgées ont été peu décrits en raison de l’absence d’intérêt. On estime cependant que sa prévalence est  de 1% de 60 à 65 ans, contre un pourcentage d’environ 5%  sur la vie entière. On estime d’autre part que 12% des personnes âgées de 65 ans et plus hospitalisées l’ont été à cause de troubles bipolaires.

Il faut différencier les formes précoces (qui apparaissent vers l’âge de 20 ans) des formes tardives (qui surviennent après 50 ans). Chez ces dernières, le cours de la maladie et son évolution sont plus sévères.

Le diagnostic s’avère difficile car le patient âgé peut présenter une dépression agitée, une manie dysphorique (manie avec symptômes agressifs) ou un épisode confusionnel qui peuvent évoquer un trouble bipolaire. Le médecin devra considérer le diagnostic de trouble bipolaire lorsque la personne âgée souffre d’une dépression majeure.

Critères diagnostiques

Pour lire les critères diagnostiques, consultez l’article sur la dépression.

Toutes manifestations d’un trouble thymique chez une personne âgée peut évoquer un trouble bipolaire si l’on retrouve les éléments suivants:

  • Antécédents de troubles bipolaires;
  • début précoce;
  • antécédents de troubles d’anxiété et de dépression avant 25 ans;
  • pensées ou tentatives de suicides;
  • ruptures;
  • cyclothymie;
  • répond bien aux antidépresseurs et aux régulateurs de l’humeur.

Critères des troubles bipolaires selon le manuel DSM-V

Trouble bipolaire de type 1

  1. Une période nettement délimitée durant laquelle l’humeur est anormalement élevée, expansive ou irritable.
  2. Au cours de cette période de perturbation de l’humeur et d’énergie ou d’activité accrue, 3 (ou plus) des symptômes suivants (4 si l’humeur est seulement irritable) sont présents significativement  :
    1. Estime de soi exagérée ou idées de grandeur.
    2. Besoin de moins dormir
    3. Plus grande loquacité que d’habitude
    4. Fuite des idées ou sensation subjective que les pensées défilent.
    5. Distractibilité rapportée ou observée
    6. Augmentation de l’activité orientée vers un but ou agitation psychomotrice (activité sans but).
    7. Engagement excessif dans des activités pouvant avoir des conséquences dommageables (p. ex., s’engager dans des achats inconsidérés, des conduites sexuelles inconséquentes)
  3. La perturbation de l’humeur est suffisamment sévère pour entraîner une altération marquée du fonctionnement social ou professionnel ou pour nécessiter une hospitalisation.
  4. L’épisode n’est pas dû aux effets physiologiques directs d’une substance (p. ex. substance donnant lieu à abus, médicament ou autre traitement) ou d’une affection médicale générale.

NB : Un épisode maniaque qui apparaît et persiste au cours d’un traitement antidépresseur est considéré comme un épisode maniaque et, par conséquent, justifie un diagnostic de trouble bipolaire I.

Critères d’un épisode d’hypomanie

  1. Une période nettement délimitée, d’au moins 4 jours consécutifs, d’humeur anormalement élevée, expansive ou irritable, et d’augmentation anormale de l’activité ou de l’énergie.
  2. Au cours de cette période de perturbation de l’humeur et d’énergie ou d’activité accrue, 3 (ou plus) des symptômes suivants (4 si l’humeur est seulement irritable) ont persisté :
    1. Estime de soi exagérée ou idées de grandeur.
    2. Besoin de moins dormir.
    3. Plus grande loquacité que d’habitude ou désir de parler constamment.
    4. Fuite des idées ou sensation subjective que les pensées défilent.
    5. Distractibilité rapportée ou observée.
    6. Augmentation de l’activité orientée vers un but ou agitation psychomotrice (activité sans but).
    7. Engagement excessif dans des activités à potentiel élevé de conséquences dommageables (p. ex., s’engager dans des achats inconsidérés, des conduites sexuelles inconséquentes)
  3. L’épisode s’accompagne de modifications notables du fonctionnement.
  4. La perturbation de l’humeur et le changement dans le fonctionnement sont manifestes pour les autres.
  5. La sévérité de l’épisode n’est pas suffisante pour entraîner une altération marquée du fonctionnement professionnel ou social, ou pour nécessiter une hospitalisation.
  6. L’épisode n’est pas dû aux effets physiologiques directs d’une substance (p. ex. substance donnant lieu à abus, médicament ou autre traitement) ou d’une affection médicale générale.

NB : Un épisode maniaque qui apparaît et persiste au cours d’un traitement antidépresseur est considéré comme un épisode maniaque et, par conséquent, justifie un diagnostic de trouble bipolaire I.

Critères d’un épisode de dépression majeure

Les épisodes de dépression majeure sont fréquents dans le trouble bipolaire de type I, mais ne sont pas nécessaires pour le diagnostic.

Dans le trouble bipolaire de type 2, les critères d’au moins un épisode d’hypomanie ET d’au moins un épisode de dépression majeure, actuels ou passés, sont rencontrés. Il n’y a pas d’épisode de manie.

Trouble cyclothymique

Un diagnostic de trouble cyclothymique peut s’appliquer lorsque, pendant deux ans, des périodes hypomaniaques et dépressives sont vécues la moitié du temps, sans jamais que les critères d’un épisode de manie, d’hypomanie, ou de dépression majeure soient remplis.

Caractéristiques cliniques

Les troubles bipolaires sont mal connus en raison de fréquents symptômes atypiques qui accompagnent les symptômes classiques, et qui sont résumés ci-dessous:

Les symptômes classiques

Hyperactivité, diminution de l’envie de dormir, délire de grandeur, excitation psychomotrice, dépenses exagérées, présence éventuelle de signes psychotiques qui sont congruents à l’humeur, voire des hallucinations.

Les symptômes atypiques

Ce sont des symptômes qui ne sont pas nécessairement retrouvés chez les plus jeunes et ne rentrent pas toujours dans les critères diagnostiques.

  • L’hyperactivité est plus prononcée chez les jeunes. Elle se retrouve chez la moitié des patients âgés maniaques.
  • L’irritabilité, la colère et l’agressivité sont plus fréquentes que chez les jeunes (50% des personnes maniaques).
  • Les symptômes confusionnels avec troubles de la conscience sont très courants et s’atténuent avec le traitement de l’épisode maniaque.
  • Les troubles cognitifs (troubles de l’attention), souvent associés à une confusion et une agitation.
  • Un délire paranoïde s’exprimant sous la forme d’idées persécutoires (environ 10% des patients âgés maniaques).
  • Une euphorie moins fréquente que chez les plus jeunes.
  • Symptômes dépressifs (on dit que le patient souffre de dépression agitée parfois provoquée par une anxiété; risque de suicide important).

Caractéristiques des épisodes de manie

Pendant les épisodes de manie, les symptômes peuvent inclure:

  • des émotions élevées ou être très heureux
  • hyperactivité
  • parler très rapidement, avec des changements rapides de sujet
  • pensées rapides
  • sentiments d’auto-importance
  • adopter des comportements spontanés et risqués
  • irritabilité
  • délires
  • Difficulté à dormir

L’état mixte

Les individus peuvent également ressentir des symptômes de dépression au cours d’un épisode maniaque (ou en alternance rapide), que les professionnels de la santé mentale peuvent appeler des symptômes mixtes.

L’état mixte est relativement fréquent dans les troubles bipolaires. On peut parler également de manie dysphorique.

Les critères de la manie dysphorique sont les suivants:

Critère 1. Critères d’un syndrome maniaque ou hypomaniaque.

Critère 2. Présence simultanée de symptômes dépressifs.

  • Humeur dépressive (dysphorie).
  • Diminution marquée de l’intérêt ou du plaisir dans presque toutes les activités.
  • Gain significatif de poids ou augmentation de l’appétit.
  • Hypersomnie.
  • Ralentissement psychomoteur.
  • Fatigue ou perte d’énergie.
  • Sentiment de culpabilité excessive.
  • Sentiments de désespoir.
  • Pensées récurrentes de mort, idées suicidaires récurrentes.

Critère 3. Spectre diagnostique de la manie dysphorique.

  • Manie dysphorique définie, si présence de 3 symptômes dépressifs.
  • Manie dysphorique probable, si présence de deux symptômes dépressifs.
  • Manie dysphorique possible, si présence d’un seul symptôme dépressif.

Causes du trouble bipolaire

On ne sait pas actuellement ce qui cause le trouble bipolaire.

La cause est probablement une combinaison de facteurs biologiques et environnementaux qui conduisent au développement d’un trouble bipolaire. Les facteurs de risque de trouble bipolaire comprennent:

  • Les causes du trouble bipolaire ont une composante génétique : de nombreuses études familiales ont montré, chez les parents des patients atteints de trouble bipolaire, une prévalence supérieure du trouble bipolaire par rapport aux sujets de contrôle ne souffrant pas de maladie mentale. Le risque à vie de trouble bipolaire chez les parents au premier degré d’un patient atteint de trouble bipolaire est de 40 à 70 % pour un jumeau monozygote et de 5 à 10 % pour tous les autres parents au premier degré. Les études moléculaires génétiques n’ont toutefois pas identifié de gènes candidats particuliers pour le trouble bipolaire.

La manie à début tardif est plus fréquente chez les femmes que chez les hommes et plus fréquemment associée à des facteurs organiques tels que :

Maladies neurologiques : AVC, tumeurs, traumatisme crâniens.

Troubles thyroidiens, métaboliques et carences nutritionnelles (p.ex. en vitamine B12)

Prescription de certaines médicaments (p.ex. corticostéroides, lévodopa, psychostimulants) ou consommation excessive d’alcool.

Que se passe-t-il dans le cerveau ?

Les circuits neuroanatomiques qui mettent en jeu le système limbique, le thalamus, les ganglions de la base et le cortex sont dérégulés.

Cependant, la communauté scientifique ne sait pas si la dysrégulation de ces circuits est à l’origine du trouble bipolaire ou si ces régions sont touchées suite à la maladie.

Des études reposant sur l’imagerie cérébrale ont révélé le fondement neuroanatomique du trouble bipolaire. 

lles ont démontré une réduction du volume et de l’activité de la substance grise, de certaines parties du cortex préfrontal, du corps strié (région impliqué dans la motricité), ce qui suggère qu’il y a une réduction du nombre de neurones chez ces patients.

Les neurotransmetteurs appelés monoamines (noradrénaline, sérotonine et dopamine) et l’acétylcholine interviennent dans l’étiologie des troubles de l’humeur.

Il est faux de croire que la concentration de ces neurotransmetteurs augmente pendant un épisode maniaque et diminue au cours de la dépression. L’étiologie des troubles de l’humeur repose plutôt sur un mauvais fonctionnement des neurones qui produisent ces neurotransmetteurs.

L’acétylcholine, dont le rôle est supporté par le fait que les médicaments qui aumentent la concentration d’acétylcholine (par exemple avec des agonistes cholinergiques) diminuent les phaes maniaques, ce qui suggère l’existence d’un déficit d’acétylcholine chez les patients souffrant d’épisodes maniaques.

Les études ont montré chez les patients bipolaires déprimés, des niveaux sanguins anormalement bas de noradrénaline et de sérotonine.

Rappelons que la dopamine a un rôle crucial dans le processus de motivation par récompense et que la perte de motivation est une des caractéristiques principales de la dépression.

De plus, il a été montré que les sujets dépressifs présentent une baisse significative des niveaux d’acide homovanillique (HVA), un métabolite dopaminergique dans le liquide céphalorachidien.

A l’inverse, les médicaments activant la dopamine (par exemple les agonistes de la dopamine) facilitent les épisodes maniaques, suggérant un rôle de ce neurotransmetteur dans l’étiologie des troubles bipolaires.

L’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (en abrégé HPA): Il est admis que les anomalies de l’axe HPA jouent un rôle dans les troubles de l’humeur. L’activité intensifiée de l’axe HPA a été associée aux états maniaques mixtes, à la dépression et aux épisodes maniaques.

Evolution du trouble bipolaire

L’évolution de la maladie bipolaire chez la personne âgée est mal connue car d’une part il existe un nombre limité de cas rapportés et que, d’autre part, il est difficile de poser un diagnostic de manie chez les personnes âgées.

Son évolution dépend de l’ancienneté de la maladie : les formes précoces des troubles bipolaires (entre 20-30 ans) évolueront vers une fréquence moindre et une disparition de la maladie, alors que les formes tardives (entre 50 et 60 ans) présenteront une évolution accélérée.

Le pronostic est moins bon que dans les formes précoces en raison d’une accélération du cours de la maladie, une plus grande résistance au traitement et un risque accru de complications somatiques liées à la maladie (ex. fractures, traumatismes crâniens, infestions pulmonaires etc.). De plus, le risque d’évolution démentielle est plus important.

Complications sur la santé physique

À long terme, les personnes atteintes de trouble bipolaire peuvent rencontrer des problèmes de santé physique graves tels que:

Ces complications peuvent devenir graves. En fait, une étude estime que l’espérance de vie moyenne des personnes atteintes de trouble bipolaire est inférieure de 12 à 13 ans à celle des personnes non atteintes.

Cependant, un traitement efficace réduira le risque qu’une personne développe des complications de santé liées au trouble bipolaire.

Traitement du trouble bipolaire

Le trouble bipolaire est une affection permanente. Les traitements visent à stabiliser l’humeur d’une personne et à l’aider à gérer d’autres symptômes.

Dans certains cas, les changements d’humeur d’une personne peuvent être graves.

Les professionnels de la santé mentale adaptent les traitements à l’individu pour aider à réduire leur impact sur la vie quotidienne et le bien-être mental.

Le traitement du trouble bipolaire implique généralement une combinaison de médicaments et de thérapie.

Médicaments

Il existe plusieurs types de médicaments pour les personnes atteintes de trouble bipolaire. Le type dépendra du type et de la gravité des symptômes.

Certains des types de médicaments les plus courants pour traiter le trouble bipolaire sont:

  • stabilisateurs d’humeur, tels que le lithium
  • antipsychotiques, comme l’olanzapine
  • antidépresseurs , tels que la fluoxétine

Ces médicaments peuvent avoir des effets secondaires, dont certains peuvent devenir graves. Par exemple, l’utilisation d’antipsychotiques pendant une longue période peut entraîner une prise de poids, des modifications du taux de cholestérol et des problèmes cardiaques.

Thérapie

Les professionnels de la santé mentale recommandent souvent la psychothérapie en plus des médicaments pour traiter le trouble bipolaire. La psychothérapie est également connue sous le nom de thérapie par la parole.

La psychothérapie a une gamme d’avantages en plus de traiter les symptômes,  tel que par exemple fournir un soutien et une formation.

Les types de psychothérapie comprennent:

  • thérapie cognitivo-comportementale
  • thérapie axée sur la famille
  • thérapie interpersonnelle
  • psychoéducation

Autres traitements

Les combinaisons de médicaments et de thérapie sont efficaces pour de nombreuses personnes. Si une personne constate que ses médicaments n’ont pas l’effet souhaité, un professionnel de la santé mentale peut recommander d’autres options.

Par exemple, la thérapie électroconvulsive (ECT) utilise des impulsions électriques pour induire une crise, qui a un impact sur les symptômes par des voies encore inconnues. L’ECT peut être efficace pour les personnes atteintes d’un trouble bipolaire sévère et résistant au traitement.

L’Institut national de la santé mentale américaines (NIMH) affirme que les méthodes d’ECT modernes sont prometteuses pour traiter des problèmes de santé mentale. Cependant, les méthodes ECT peuvent provoquer les effets secondaires suivants:

  • maux de tête
  • maux d’estomac
  • douleurs musculaires
  • problèmes de mémoire

Des recherches sont en cours pour développer de nouvelles approches thérapeutiques liées à la stimulation cérébrale, à la modification du mode de vie et à de nouveaux médicaments pour traiter le trouble bipolaire.

Le trouble bipolaire peut également entraîner une série de complications de santé physique au fil du temps, telles que les maladies cardiovasculaires.

Les professionnels de la santé détermineront le meilleur plan d’action pour prévenir ou traiter ces complications au cas par cas.

Un antidépresseur sera prescrit lors d’un épisode dépressif, et sera arrêté lors d’un épisode maniaque.

Lors d’un accès maniaque, on utilise préférentiellement en première intention un régulateur de l’humeur (lithium, carbamazépine ou valpromide).

Le choix du traitement se fait selon l’efficacité des traitements antérieurs et des effets secondaires. Les neuroleptiques (antipsychotiques) sont utilisés si l’intensité symptomatique est majeure.

Cas pratique de trouble bipolaire

Une patiente âgée de 70 ans a été conduite dans un établissement pour personnes âgées dépendantes, car elle souffrait d’un isolement social et familial, et cela malgré une bonne autonomie. Elle venait de prendre sa retraite de cadre d’une grande entreprise il y a 10 ans. Ses antécédents psychiatriques se résument à des épisodes majeurs de dépression, dont le premier à l’âge de 45 ans suite à un divorce.
Ce suivi a permis de mettre à jour l’existence d’un trouble de personnalité de type histrionique (dépendance affective, expression émotionnelle superficielle et rapidement changeante, exagération de l’expression émotionnelle, changement fréquent d’humeur; crises de colère; ces symptômes conduisent à une perturbation des relations interpersonnelles et à un isolement).

Sa fille a souffert également d’un épisode de dépression majeur, suggérant l’existence d’une composante génétique.

A l’âge de 75 ans, elle est de nouveau diagnostiquée pour une dépression majeure et traitée avec un antidépresseur (inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine de type Prozac) .

A 80 ans, elle est hospitalisée dans une clinique psychiatrique pour une récidive d’épisode dépressif majeur et traitée avec le même médicament. Deux semaines après, apparaissent une altération de la vigilance majeure accompagnée d’un état anxieux et une dysarthrie (le patient a des difficultés à parler et à émettre des sons), suggérant un état confusionnel. Elle est alors transportée vers une unité spécialisée. Aucun épisode maniaque n’a été mis en évidence.

La tomodensitométrie (scanner) cérébrale montre des signes de leucopathie vasculaire (troubles de la microvascularisation du cerveau; ce dernier est mal irrigué par les artérioles et les capillaires).

Deux hypothèses sont émises: confusion iatrogène (c’est-à-dire provoquée par l’antidépresseur) et/ou l’existence d’un trouble dépressif avec phase maniaque.

Le médecin arrête le traitement à l’antidépresseur pensant que l’état confusionnel est provoqué par ce médicament. Cependant l’état de la patient s’empira, et il apparut rapidement des troubles du comportement (par exemple agitation), suggérant plutôt l’existence d’un épisode thymiques de type maniaque.

Un antipsychotique atypique fut prescrit (olanzapine), entraînant une stabilisation du comportement au bout de quelques jours. L’olanzapine a été maintenue pendant trois mois, puis le médecin prescrivit du divalproate de sodium afin de prévenir les troubles thymiques de type maniaque en remplacement de l’olanzapine.

Un bilan cognitif doit être réalisé régulièrement afin de vérifier que le patient ne souffre pas d’une pathologie neurodégénérative débutante (par exemple une maladie d’Alzheimer).

Cette patiente appartient probablement à un sous-groupe de patients ayant souffert, vers la quarantaine, de troubles dépressifs récurrents en l’absence d’épisodes maniaques, ces derniers apparaissant à un âge plus avancé.

Episodes thymiques

Les épisodes thymiques représentent une des trois formes de troubles de l’humeur avec les troubles dépressifs et les troubles bipolaires. Les épisodes thymiques incluent des épisodes dépressifs majeurs, maniaques, mixtes et hypomaniaques.

Les troubles de l’humeur sont souvent sous-évalués car la personne âgée a tendance à ne pas verbaliser sa tristesse. Les symptômes peuvent être masqués par des problèmes somatiques ou peuvent apparaître de manière atténuée (c’est le cas par exemple des épisodes maniaques). Les épisodes maniaques peuvent aussi prendre l’apparence d’une confusion, voire d’une démence lorsque prédominent les troubles cognitifs et comportementaux (délire, agitation, désorientation spatiale et temporelle).

Cas pratique

Une patiente âgée traitée depuis plusieurs années avec un antidépresseur (elle souffrait de trouble dépressif récurrent) a été hospitalisée pour un syndrome confusionnel. Elle ne souffrait d’aucun trouble cognitif avant cette hospitalisation.

Suite à sa consultation, le corps médical soupçonne la présence d’un état maniaque accompagné d’un syndrome confusionnel. Le médecin arrête le traitement à l’antidépresseur et prescrit un médicament (un antipsychotique) pour traiter les phases maniaques.

Quand un épisode confusionnel apparaît chez un patient ne souffrant d’aucun déficit cognitif manifeste et ayant eu des antécédents de dépression, on peut évoquer la possibilité d’un trouble dépressif ou d’un épisode maniaque survenant lors d’un trouble bipolaire.

Si l’épisode maniaque est retenu, le médecin doit arrêter le traitement antidépresseur et prescrire un médicament contre la manie (par exemple un antipsychotique) ainsi qu’un régulateur de l’humeur.

L’épisode maniaque chez la personne âgée

Symptômes classiques: hyperactivité, diminution de l’envie de dormir, délire de grandeur, excitation psychomotrice, dépenses exagérées, présence éventuelle de signes psychotiques qui sont congruents à l’humeur, voire des hallucinations.

Symptômes atypiques: ce sont des symptômes qui ne sont pas nécessairement retrouvés chez les plus jeunes. Ils ne rentrent pas toujours dans les critères diagnostiques communément admis.
– L’hyperactivité est plus prononcée chez les jeunes. Elle se retrouve chez la moitié des patients âgés maniaques.
– L’irritabilité, la colère et l’agressivité sont plus fréquentes que chez les jeunes (50% des personnes maniaques).
– Les symptômes confusionnels avec troubles de la conscience sont très courants et s’atténuent avec le traitement de l’épisode maniaque.
– Les troubles cognitifs (troubles de l’attention), souvent associés à une confusion et une agitation.
– Un délire paranoïde s’exprimant sous la forme d’idées persécutoires (environ 10% des patients âgés maniaques).
– Une euphorie moins fréquente que chez les plus jeunes.
– Symptômes dépressifs (on dit que le patient souffre de dépression agitée parfois provoquée par une anxiété; risque de suicide important).