Apnée du sommeil : facteur de risque d’Alzheimer ?

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Les personnes atteintes d’apnée du sommeil auraient un risque accru de maladie d’Alzheimer.

Une étude précédente avait rapporté un lien entre apnée du sommeil et un déclin cognitif.

Une nouvelle étude examine les liens potentiels entre l’apnée du sommeil et la maladie d’Alzheimer.

Dans une nouvelle étude, des scientifiques français ont scanné le cerveau des personnes âgées. Ils ont trouvé une association entre l’apnée du sommeil et la présence de plaques amyloïdes et d’autres changements biologiques associés à l‘inflammation et à la maladie d’Alzheimer.

Les scientifiques ont publié leurs résultats dans la revue Neurologie JAMA.

Il existerait un lien entre l’apnée du sommeil et les lésions caractéristiques de la maladie d’Alzheimer

Suivi des changements dans le cerveau

Dans cette dernière recherche, les scientifiques ont recruté 127 hommes et femmes retraités de plus de 65 ans vivant en France et déjà inscrits dans un essai clinique à l’échelle européenne évaluant la santé mentale et le bien-être d’une population vieillissante.

Tous les participants ont répondu à des questionnaires sur leur fonction cognitive et la qualité de leur sommeil. Seules les personnes qui ne présentaient aucun symptôme de perte de mémoire pouvaient participer à l’étude.

Les chercheurs ont donné à chaque personne un appareil domestique portable pour enregistrer la qualité de son sommeil et sa respiration pendant qu’elle dormait.

En mesurant la fréquence et la durée d’une baisse de la pression nasale du participant, les chercheurs ont pu diviser les participants en deux catégories: ceux avec et sans troubles respiratoires du sommeil.

L’équipe d’étude a également testé la mémoire et la fonction cognitive des participants, y compris la fonction exécutive.

Tous les participants ont subi des scanners d’imagerie cérébrale, y compris des images par résonance magnétique (IRM) et des tomographies par émission de positons (TEP). Un sous-groupe de 87 personnes a également subi un scan FDG-PET pour mesurer le métabolisme du glucose dans le cerveau.

Lien entre la qualité du sommeil et la maladie d’Alzheimer

L’équipe d’étude a constaté qu’environ 75% des participants souffraient d’apnée du sommeil et qu’il y avait une accumulation marquée de protéines amyloïdes dans leur cerveau, caractéristique de la maladie d’Alzheimer.

Ils ont également trouvé un volume de matière grise significativement plus élevé et une activité neuronale accrue dans les régions du cerveau associées à la maladie d’Alzheimer, dont le cortex cingulaire. Ces observations suggèrent une inflammation dans cette zone du cerveau.

Lorsqu’ils ont analysé les données, les chercheurs n’ont trouvé aucune différence entre les problèmes de mémoire autodéclarés et les sentiments de somnolence entre les deux groupes.

«À une époque où les essais cliniques sur les traitements de la maladie d’Alzheimer ne sont pas encore couronnés de succès, l’identification des facteurs de risque et des facteurs de protection intéresse un nombre croissant de chercheurs».

«Grâce à l’utilisation de multiples méthodes d’imagerie cérébrale, cette étude nous a permis de clarifier les mécanismes expliquant les liens entre la qualité du sommeil, le risque de déclin cognitif et la maladie d’Alzheimer», explique l’auteure principale Dre Géraldine Rauchs de l’Université de Caen, France.

«Bien que cela ne signifie pas que ces personnes développeront nécessairement la maladie, elles courent un risque plus élevé. De plus, des solutions efficaces existent pour traiter l’apnée du sommeil. La détection et le traitement des troubles du sommeil, en particulier l’apnée du sommeil, feront donc partie de l’arsenal pour favoriser un vieillissement réussi », explique-t-elle.

Il s’agit de la première étude du genre à utiliser plusieurs méthodes d’imagerie cérébrale sur un grand groupe de participants de la communauté en général.

Lien entre apnée et marqueurs de la maladie d’Alzheimer

Les chercheurs ont trouvé une association entre l’apnée du sommeil et la maladie d’Alzheimer, ce qui pourrait montrer un mécanisme biologique sous-jacent commun. Cependant, l’étude ne visait pas à montrer la causalité ou le fait que les personnes atteintes de marqueurs biologiques de la maladie d’Alzheimer développaient des symptômes de démence.

Les chercheurs ont l’intention de poursuivre leurs travaux en recherchant s’il existe une différence entre les lésions cérébrales chez les hommes et les femmes. Ils prévoient également d’évaluer si le traitement de l’apnée peut faire une différence dans les changements cérébraux.

Deux autres études suggèrent que l’apnée du sommeil est un facteur de risque de la maladie d’Alzheimer

L’apnée obstructive du sommeil augmente le risque de développer la maladie d’Alzheimer, probablement en augmentant les dépôts d’amyloïde dans le cerveau.

Elle précipiterait également les premiers troubles de mémoire.

En 2017, une étude a montré que la sévérité de l’apnée obstructive du sommeil va de pair avec un niveau plus élevé d’amyloïdes (lésions caractéristiques de la maladie d’Alzheimer) dans le cerveau. Ainsi, les individus avec plus d’apnées par heure ont eu une plus grande accumulation d’amyloïdes dans le cerveau.

L’apnée obstructive du sommeil affecte de 30 à 80% des personnes âgées.

« Plusieurs études ont suggéré que les troubles du sommeil pourraient contribuer aux dépôts amyloïdes et accélérer le déclin cognitif chez les personnes à risque », a déclaré le Dr R. Osorio, MD, auteur principal de l’étude et professeur de psychiatrie à l’Université de New York.

L’étude a inclus 208 participants, âgés de 55 à 90, présentant une cognition normale. Les chercheurs ont effectué des ponctions lombaires pour prélever du liquide céphalo-rachidien (LCR) auprès des participants, puis utilisé la tomographie par émission de positons pour mesurer les dépôts d’amyloide directement dans le cerveau.

Les résultats ont révélé que plus de la moitié des participants avaient une apnée obstructive du sommeil, dont 36,5% d’intensité légère et 16,8% d’intensité modérée à sévère. De l’échantillon total de l’étude, 104 ont participé à une étude longitudinale sur deux ans. Il a été observé une corrélation entre la sévérité de l’apnée et une augmentation des dépôts
amyloïdes dans le cerveau.

L’étude n’a en revanche pas trouvé que la sévérité de l’apnée était annonciatrice d’une détérioration cognitive chez ces adultes âgés en bonne santé, ce qui peut paraître étonnant.

«Il est clair que le sommeil est important pour la mémoire » rajoute-t-il. « Souvent, les gens qui souffrent d’apnée du sommeil ne savent pas. Leurs voies respiratoires sont temporairement bloquées, ce qui les oblige à se réveiller inconsciemment. Certaines personnes souffrant d’apnée du sommeil peuvent se réveiller au moins 35 fois par heure. »

Selon les chercheurs, la ventilation nocturne en pression positive continue, les appareils dentaires, la thérapie positionnelle et autres traitements de l’apnée du sommeil pourrait retarder la déficience cognitive et la démence chez de nombreux individus âgés.

En 2015, la même équipe avait montré dans la revue Neurology que l’apnée du sommeil non soignée avance de 13 ans en moyenne l’apparition des premiers signes de perte de mémoire (77 ans au lieu de 90).

Elle confirme une étude précédente (voir ci-dessous) ayant montré que les personnes âgées présentant des apnées du sommeil – signes de respiration perturbée pendant le sommeil – sont plus susceptibles d’avoir un risque de développer la maladie d’Alzheimer.

L’apnée du sommeil a également des effets néfastes sur la système cardiovasculaire en augmentant le risque de maladies cardiaques, de diabète de type 2, d’hypertension artérielle et d’obésité. Elle augmenterait le
risque d’accident vasculaire cérébral
.

Cela expliquerait, du moins en partie, son impact délétère sur le cerveau de la personne âgée.

La bonne nouvelle est qu’en traitant ces troubles respiratoires nocturnes à l’aide d’un masque à pression positive, son effet délétère disparait.

2470 dossiers médicaux de personnes âgées de 55 à 90 ans participant à une étude sur la maladie d’Alzheimer ont été analysés.

Le fait qu’il existe une corrélation entre apnée du sommeil et maladie d’Alzheimer ne signifie par pour autant qu’il existe un lien de cause à effet.

L’apnée du sommeil toucherait, chez les personnes âgées, un homme sur deux et une femme sur quatre, dont une bonne partie n’en est pas conscient.

Les personnes souffrant d’apnées du sommeil non traitées ronflent bruyamment, ont une respiration qui s’arrête en pleine nuit et se sentent fatiguées le jour.

Sources. R A Sharma et coll. Obstructive Sleep Apnea Severity Affects Amyloid Burden in Cognitively Normal Elderly: A Longitudinal Study. American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine, 2017. Osorio RS et coll. Alzheimer’s Disease Neuroimaging Initiative. Sleep-disordered breathing advances cognitive decline in the elderly. Neurology, 12;84(19):1964-71, 2015.

L’apnée du sommeil favoriserait le déclin cognitif

Le syndrome d’apnées du sommeil pourrait favoriser un déclin cognitif, en plus d’être associé à des complications cardiovasculaires et métaboliques.

Le syndrome d’apnées du sommeil (SAS) est le trouble du sommeil le plus grave, entraînant une augmentation de la morbidité et de la mortalité. Ce trouble peut être associé à des complications cardiovasculaires et métaboliques, ainsi qu’à une altération des performances cognitives. Environ la moitié des patients de 65 ans et plus consultant dans les cabinets médicaux se plaignent de troubles du sommeil.

Il semblerait que le SAS précède le déclin cognitif, selon une étude (Study of Osteoporotic Fractures) publiée chez 298 femmes, âgées en moyenne de 82 ans, indemnes de troubles cognitifs et suivies pendant près de 5 ans. Les participantes ont subi un enregistrement polysomnographique nocturne en début d’étude et leurs performances cognitives ont été évaluées au début et en fin d’étude.

Résultats. Parmi elles, un tiers souffraient d’apnées/hypopnées, avec au moins 15 épisodes d’arrêt respiratoire ou d’hypoventilation par heure. 20% ont manifesté un déclin cognitif léger et 15% ont développé une démence. La présence de troubles respiratoires du sommeil est associée à un risque accru (+85%) de déclin cognitif léger. Cette augmentation du risque n’est pas due à la présence d’une comorbidité ou d’autres facteurs de risque. De plus, les participantes dont le temps de sommeil en apnée ou hypopnée est augmentée de 7% ont un risque de troubles cognitifs multipliés par deux. En revanche, le temps de sommeil ne semble pas avoir d’effet néfaste. Les auteurs soulignent en outre le rôle délétère que joueraient les épisodes d’hypoxie intermittente chez les personnes qui souffrent de troubles respiratoires.

Il est fort probable que la pression positive continue améliore la performance cognitive chez des sujets souffrant de troubles cognitifs.

Conclusion: le syndrome d’apnées du sommeil peut favoriser un déclin cognitif

Sources: Psychol Neuropsychiatr Vieil, 2010; J Bras Pneumol. 2010 Jun.